Saint-Jean-Pied-de-PortDonibane-Garazi |
Saint-Jean-Pied-de-Port (port signifiant "col" ), capitale du Pays de Cize en Basse-Navarre, est située au confluent des Nives d'Arnéguy et de Béhérobie et au pied des deux routes qui montent vers le col d'Ibañeta et de Roncevaux. Saint-Jean-Pied-de-Port était situé sur la route préhistorique de l'étain, l'une des plus anciennes d'Europe, devenue la grande voie romaine Bordeaux - Astorga (en Espagne dans les Asturies). Seul grand passage vers la Péninsule Ibérique, il fut emprunté par les Barbares, Germains, hordes Wisigothes, cavaliers Maures, Charlemagne et ses Francs en 778. Le Royaume de Navarre, ordonné en 824, comprenait 5 parties juridico-militaires sur le versant Sud, la 6ème se trouvait versant Nord ("Merindad de Ultra Puertos") et avait pour capitale Saint-Jean-Pied-de-Port. Si, vers 1170, le pays de Cize dépendait du Duc d'Aquitaine, il dut passer dès la fin du XIIème siècle sous la suzeraineté du roi de Navarre qui avait un châtelain à Saint-Jean-Pied-de-Port dès 1191, et un château sur la colline de Mendiguren. C'est au pied de ce château qu'au début du XIIIème siècle, le roi de Navarre créa « une ville neuve» à laquelle il octroya la coutume de Bayonne, et un marché. Les habitants avaient l'obligation de construire, d'entretenir et de garder les remparts. Saint-Jean-Pied-de-Port figura parmi les villes représentées aux Cortès de Navarre; désormais elle supplanta Saint-Jean-le-Vieux, et la route de Valcarlos fut plus fréquentée que la fameuse voie romaine. A l'intérieur des remparts du Moyen Age encore existants le « Bourg Mayor» comprenait la place de l'église où était le marché, chapitel (1294), et l'actuelle rue de la Citadelle qui se prolongeait par la rue Saint-Jacques (1364) aujourd'hui détruite. Sur le chapitel, ou à proximité, s'élevait la mairie (1376). Très vite sur la rive gauche de la Nive se construisit le bourg Saint-Michel (1292), actuel quartier de la rue d'Espagne, qui fut fortifié dès le Moyen Age. L'ancienne église Saint-Jean-Baptiste devint Notre-Dame du Bout du Pont, dont le curé s'intitula Caperan Mayor (curé majeur) et fut vicaire général de l'évêque de Bayonne pour la partie de la Basse-Navarre qui en dépendait. De 1383 à 1417 pendant le grand schisme d'Occident, Saint-Jean-Pied-de-Port fut le siège de l'évêque de Bayonne relevant du pape d'Avignon, tandis qu'à Bayonne siégeait l'évêque relevant de celui de Rome. Les trois évêques, dits de Saint-Jean-Pied-de-Port, furent Pierre de Sumalaga, Garcias Eugui et Guillaume-Arnaud de Laborde qui récupéra le siège de Bayonne à la fin du Grand Schisme. L'évêque de Bayonne avait d'ailleurs une résidence sur la place de l'Église (1364). La Maison des Évêques dans la rue de la Citadelle relève de la légende ; quant à la fameuse "Prison des Évêques", c'est un édifice du XIIIème ou du XIVème siècle, peut-être l'ancien hôtel de ville ou le siège d'une bourse de marchands, qui servit de prison municipale en 1795. Au XIXème siècle, il fut utilisé comme locaux disciplinaires pour les soldats de la garnison postée à la Citadelle. A partir de 1940, au moment du Service de Travail Obligatoire, les Allemands y enfermaient tous les hommes qui tentaient de fuir vers l'Espagne et l'Afrique du Nord. La crypte, immense salle gothique, fut édifiée vers le XIIIème siècle. Des marques de tâcherons gravés par les tailleurs de pierre du Moyen Age pour identifier leur oeuvre apparaissent sur certaines pierres. Son appellation de "Prison des Évêques" et les deux inscriptions qui l'ornent datent de moins de cinquante ans…
Outre l'église, Saint-Jean-Pied-de-Port possédait une chapelle à la citadelle et une autre, consacrée à Saint-Jacques à la porte Saint-Jacques, dont on a retrouvé les substructures. Il y avait aussi un hôpital Sainte-Marie près de l'église. Trois hôtelleries : celles du Cheval Blanc, d'Espagne et de la Fleur de Lys, recevaient marchands et pèlerins. C'est à Notre-Dame-du-Pont que fut signé en 1384 entre Gramont et Luxe le traité de paix qui fut sanctionné par l'érection de la chapelle Saint-Antoine de Musculdy. Sur le territoire de Saint-Jean-Pied-de-Port, on trouvait les maisons nobles ou infançonnes suivantes: la maison du Caperan Mayor, Alhaste, Anta, Ansisala (à Saint-Jean-Pied-de-Port ou à Uhart-Cize), Beola, Etxegaraya, Logras érigée en marquisat en 1758, et Lohiteguy. Au XVIème siècle après la prise de la Navarre par Ferdinand d'Aragon, Saint-Jean-Pied-de-Port fut pris et repris par les Espagnols et la dynastie légitime de Navarre, pour rester à celle-ci vers 1530. La paix revenue, la ville s'étendit hors les murs, à l'extérieur desquels s'établit le marché, bordé par de belles maisons navarraises des XVIIème et XIIIème siècles; l'antique paroisse de Ste-Eulalie d'Ugange fut absorbée. L'accession au trône de France en 1589 du Béarnais Henri IV entraîna le rattachement de la Basse Navarre à la Couronne de France, rattachement qui eut lieu officiellement en 1620 sous Louis XIII et que le Roi d'Espagne reconnut solennellement au Traité des Pyrénées en 1659. En 1628, sous Richelieu, le château des rois de Navarre fut remplacé par la citadelle, élevée par le Chevalier Antoine Deville et complétée par Vauban sur l'ordre de Louis XIV de 1716 à 1728. Les défenses d'abord tournées vers le Nord, se dirigèrent vers le Sud, la citadelle fut couverte par un camp retranché dont les redoutes parsèment les montagnes de Cize. Réunis à Saint-Jean-Pied-de-Port en 1789, les États de Navarre déclarent que les Navarrais ne sont pas Français et refusent d'envoyer des députés aux États Généraux. Leurs privilèges sont abolis la nuit du 4 août 1789. La Basse-Navarre, la Soule et le Labourd sont rattachés au Béarn pour former le département des Basses Pyrénées. Sous la Révolution, Saint-Jean-Pied-de-Port fut appelée "Nive Franche". En 1793 et 1794, c'est à partir de cette position militaire que s'ordonneront toutes les expéditions contre l'Espagne aux cours desquelles s'illustreront les Volontaires, puis les dix compagnies de Chasseurs Basques sous le commandement du futur Maréchal Harispe. La citadelle abrita plus de 2000 hommes au XVIIIème siècle. Pendant la guerre de 1914-18, des prisonniers allemands et des disciplinaires Français furent enfermés dans la citadelle. La troupe occupa les lieux jusqu'en 1923. Devenue propriété municipale, la Citadelle hébergea de 1936 à 1939, 500 enfants réfugiés basques de la guerre civile espagnole. Elle est transformé de nos jours en Collège Enseignement Secondaire public. En 1898, le train arrive à Saint-Jean-Pied-de-Port. Saint-Jean fut la patrie de - Juan de Huarte (1532-1590) médecin-philosophe, créateur au 16ème siècle de la caractérologie, précurseur de l'orientation professionnelle, auteur d'un ouvrage célèbre utilisé par Montesquieu dans "Esprit des Lois". Il se fit remarquer par le zèle formidable et l'extrême courage qu'il montra durant la Peste de Baeza (Andalousie) en 1566. Le mur de soutènement de l'hôtel des Pyrénées porte un bas-relief qui le représente, visible de la place du Jaï Alaï. - Jean de Mayorga (1531-1570) né à la maison Aranzola(1531), jésuite martyrisé en 1570 au large des Canaries par des corsaires calvinistes. - Michel Renaud (1811-1885), homme politique catholique de gauche. - Charles Floquet, né au n°33 de la rue de la Citadelle (1828-1896), avocat républicain qui fut ministre sous la IIIème République. - Sur la place de l'Eglise, habitaient aux XIVème et XVIème siècles, les Jasso, ancêtres de St François-Xavier. Pierre de Jasso fut "tributador" du marché : il y percevait les droits dus au roi. La Nive longe l'église du XIIIème siècle, elle est franchie par le pont Notre-Dame et le "pont romain", en réalité du Moyen Age... Les remparts de grès rose sont percés de portes en arc brisé : porte Notre-Dame, porte du marché, porte de France, enserrent un grand nombre de maisons à inscriptions qui bordent la rue à pic de la Citadelle. L'ancien bourg Saint-Michel sur la rive droite, autour de la rue d'Espagne, abonde aussi en maisons remarquables, dont celle dite «des États de Navarre». C'est dans celle-ci qu'eut lieu la dernière session des États de Navarre du 19 au 22 septembre 1789. On peut remarquer que l'écusson a été martelé... Hors les murs, la maison dite « de Mansart », actuel Hôtel de Ville, si elle n'est pas l'œuvre du célèbre architecte, est un très bel édifice des XVIIème et XVIIIème siècles. La paroisse Sainte-Eulalie d'Ugange, actuellement englobée dans le territoire de Saint-Jean est probablement plus ancienne. Elle est mentionnée en 1253, mais la chapelle romane et le portail, récemment dégagé et déplacé sur la façade de la maison de retraite, témoignent d'une origine antérieure. En 1569, durant les guerres de religion, les calvinistes de Montgomery brûlèrent Sainte Eulalie et exterminèrent les prêtres. Le nom de Sainte-Eulalie, martyre de l'église de Mérida en Catalogne, rattache cette paroisse à la première évangélisation venue de la vallée de l'Èbre. Il semble qu'elle ait été accompagnée d'un hôpital pour les pèlerins. Le lundi, tous les agriculteurs du Pays de Cize se rassemblent à Saint-Jean-Pied-de-Port, car c'est le jour de marché. Chaque année, le 10 août, se déroule la foire au fromage. La rue d'Espagne: (anciennement rue Saint Michel) De nombreux linteaux portent des inscriptions indiquant la date d'édification ou de restauration, le nom de la maison ou de ses propriétaires, le métier... Au n°9, au dessus d'une pâtisserie, nous pouvons lire sur le linteau: "LAN 1789 LE FROMENT FT A 15L": L'an 1789 le froment fut à 15 livres la conque. Sur la même maison, beaucoup plus haut, sur la poutre située juste au dessous des solives qui soutiennent l'avant toit, nous pouvons remarquer une frise composée de têtes et de motifs composés de croix, de rosaces et de virgules. Plusieurs maisons ont des façades de grès rose alternés de gris. A l'extrémité Nord de la rue d'Espagne se trouve la porte Notre-Dame dans laquelle est nichée une copie de la Vierge à l'Enfant qui, lors des guerres de religion, trouva refuge en Haute Navarre, mais ne fut jamais restituée. Au pied de la rue de la Citadelle (à son extrémité Sud) se trouve l'église Notre-Dame du Bout du Pont. Son portail gothique rayonnant du XIVème siècle a été restauré et présente de belles décorations. On trouve sur la façade de l'église, plusieurs marques de tâcherons (ces marques se retrouvent également sur la porte Notre-Dame). A l'intérieur, tout de suite en rentrant à gauche, on peut remarquer au revers du mur de façade, une pierre gravée d'une croix et de deux clés, dont l'une déborde sur la pierre adjacente. Juste à côté de l'église, on peut remarquer une jolie fontaine décorée d'une coquille Saint Jacques. Au sommet de la rue de la Citadelle se trouve la porte Saint Jacques qu'empruntaient les pèlerins en provenance d'Ostabat. Dans cette rue se trouve un lieu d'hébergement pour les pèlerins qui affluent encore de nos jours. Nous pouvons remarquer sur la porte d'une maison, un heurtoir et une serrure ornés de coquilles Saint Jacques. Tout au long de la rue nous pouvons remarquer de nombreux linteaux et clés de voûte sculptés. Un linteau est daté de façon particulière: il comporte une double date : "1796" et "4ème an de la République" On peut aussi remarquer pour l'anecdote, l'enseigne en forme de truite qui nous rappelle que celles-ci abondent dans les eaux de la Nive, il suffit d'observer sous les ponts pour s'en persuader... A l'extrémité nord de la ville, hors les murs, nous pouvons encore trouver quelques belles inscriptions sur les façades de maisons. |